L’IA : maillon du processus de création

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Joel Arrault

vendredi 22 décembre 2023

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Encore balbutiante hier, avec un rôle de «facilitateur» discret aiguillant nos recherches sur internet et garantissant des réponses personnalisées, l'intelligence artificielle a muté en l’espace d’un an en véritable «partenaire de travail» capable de générer des contenus d’une qualité remarquable, dans des temps d’exécution avec lesquels aucun être humain ne peut rivaliser.

L’accélération de l’IA

On n’a jamais autant parlé de l’intelligence artificielle qu’aujourd’hui. C’est pourquoi, elle est indéniablement vouée à occuper une place de plus en plus importante dans nos vies. Nombreuses sont les firmes qui, de par le monde, développent activement les technologies qui rendent possibles ces systèmes de pointe. Derrière cette recherche se cache une véritable compétition : le concepteur qui parviendra à imposer sa technologie comme LE standard bénéficiera d’un rayonnement qui lui garantira une position exceptionnelle dans la société de demain.

Face à cette révolution, le grand public est partagé entre appréhension et fascination. Le législateur tente quant à lui, tant bien que mal, de canaliser ce qui ressemble fort à un raz de marée surgissant en plein vide juridique … avec tous les excès que cela comporte, à l’image de l’Italie qui a récemment interdit ChatGPT ; ou encore, de l’actuelle grève de la Writers Guild of America, qui revendique un usage encadré de ChatGPT et l’interdiction du remplacement des scénaristes par des IA.

Il apparait que nous ne sommes qu’au début d’un phénomène qui aura des conséquences majeures, notamment sur nos métiers tournés vers la création.

 

Les vertus d’une IA bien utilisée

Quoi qu’on pense des IA, il est certain qu’elles vont venir peu à peu étoffer la palette de nos outils, à l’instar de Photoshop et des logiciels de 3D en leurs temps. En effet, celles-ci offrent de formidables perspectives pour tous les domaines de la création : le champ d’investigation qu’elles nous proposent semble quasi infini.

En outre, il est à noter que l’usage de cette intelligence « artificielle » nous incite à mettre en avant certaines qualités bien humaines : le fait de chercher les bons mots clés et les manières idéales de formuler des demandes (prompts) pour arriver au plus vite vers un résultat pousse en effet l’utilisateur à clarifier ses idées, à synthétiser, à trier ses souhaits par ordre d’importance. C’est d’ailleurs pourquoi on ne peut pas nier la part de la démarche intellectuelle et créative humaine dans l’obtention d’un résultat via une IA. Dire que cette gymnastique cérébrale ne peut être que bénéfique dans le travail comme dans la vie revient à énoncer une évidence.

Prototype de moto futuriste

Cet exercice oblige également l’individu à développer une forme d’ « empathie » avec la machine, exactement comme lorsqu’on tente au quotidien de dialoguer avec un proche collaborateur en s’adaptant au mieux à ses modes de pensées, ou encore, de comprendre par quel cheminement intellectuel il est arrivé à tel résultat, en vue de futures itérations productives. A ce titre, l’IA pourrait presque faire figure d’individu à part entière, venant étoffer l’équipe, et lui faisant bénéficier de ses compétences spécifiques, si toutefois le cadre qui lui est offert est optimal.

Au demeurant, challenger l’IA présente un côté ludique tout à fait indéniable.

Si à ce jour, il persiste encore certaines limites dans ce qu’on parvient à obtenir dans le cadre d’un projet de design via des plateformes comme Dall-E, Stable Diffusion, Midjourney, ou encore Firefly, ce défaut est en partie compensé par la vitesse d’exécution propice à la multiplication des essais. Compléter une étude préliminaire en design par un cahier d’idées généré par une IA, en décuplant par l’occasion la quantité de pistes de recherche, s’avère facile et peu chronophage. Le tout étant de savoir faire le tri pour converger, à la fin, vers la solution idéale : c’est en cela que l’être humain, avec sa bonne connaissance du métier, fait toute la différence.

 

La nécessaire introspection des acteurs du design

Il est certain que les métiers de la création sont amenés à évoluer : tôt ou tard, 100% des agences et des bureaux de design intégré vont utiliser l’IA comme une part plus ou moins importante de leurs process créatifs. De nouvelles spécialités, ainsi que de nouvelles professions sont amenées à émerger. Certaines phases de travail, comme par exemple l’idéation, vont inévitablement se trouver fortement accélérées.

l’émergence de l’IA sous des formes de plus en plus user-friendly va inexorablement susciter des velléités créatives chez un nombre important de personnes qui ne sont pas du métier : réalisation de logos, de visuels divers, de sites web, et pourquoi pas de modèles 3D … cela est d’autant plus tentant qu’internet n’a jamais été aussi ouvert et accessible, et que les moyens d’impression 2D et 3D se démocratisent continuellement. Tout cela aura pour effet une période de « flou », durant laquelle, à travers un déluge de productions inégales sur le fond, mais souvent dotées de qualités esthétiques indéniables, seul un œil expert pourra distinguer celles qui s’avèreront crédibles en termes de faisabilité, de coûts, et viables dans le monde réel.

Prototypes de chaises

Parallèlement à ces phénomènes, au beau milieu d’une société s’habituant progressivement à voir jaillir des images stupéfiantes en l’espace de quelques instants, annoncer des plannings « vraiment réalistes » pour les études de design à venir risque de provoquer une certaine forme d’étonnement, voire de contestation de la part des demandeurs. C’est pourquoi, être à même d’expliquer sa méthodologie, d’annoncer clairement où se situent les véritables apports et l’expertise en toute transparence, et d’alerter sur les éventuels écueils, sont les seuls moyens objectifs d’asseoir une légitimité, et de partir sur des bases de confiance. Plus encore, il s’agit d’un devoir de pédagogie qui incombe au designer.

Pour mener à bien cette vaste tâche, il est aujourd’hui impératif de réaliser une introspection profonde : quels sont les vrais fondements de notre métier ? Quelle est la différence entre « le bon et le mauvais designer », « le bon et le mauvais design » ? Et par-dessus tout, quelles compétences qu’aucune technologie ne pourra jamais remplacer garantissent le succès d’un projet ? Répondre à ces questions, c’est tout simplement identifier la place naturelle dévolue à l’IA : l’envisager comme un outil qui s’inscrit dans un process et qui vient accompagner une démarche, servir une étude. En aucune manière, l’IA ne saurait faire figure de process à part entière, ou pire encore, de substitut à l’expert. Aujourd’hui comme hier, les succès ne doivent rien aux machines, et tout aux humains qui s’en servent.

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